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06/19/2024 | Press release | Archived content

Tuberculose : la recherche opérationnelle menée sous la conduite de l’OMS montre que des régimes thérapeutiques plus courts sont sûrs et efficaces

Entre 2020 et 2023, les responsables de programmes nationaux de lutte contre la tuberculose de 13 pays ont collaboré avec l'OMS/Europe afin d'examiner les résultats obtenus chez des personnes ayant subi un traitement de 9 mois contre la tuberculose multirésistante. Les conclusions de cette étude, récemment publiée dans la revue The Lancet Infectious Diseases, démontrent des niveaux élevés de sécurité et d'efficacité, avec un taux de réussite thérapeutique de 83 % et une probabilité de rechute de seulement 1 % au bout de 12 mois.

La recherche portait sur 2 636 sujets, soit l'une des plus importantes cohortes jamais étudiées de patients atteints de tuberculose multirésistante. Elle était financée par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, l'Agence américaine pour le développement international et le gouvernement allemand.

Pour satisfaire aux normes exigeantes de l'étude, tous les cliniciens et agents de santé des programmes nationaux de lutte contre la tuberculose ont dû être formés dans une série de domaines, tels que le dépistage des effets secondaires chez les patients, la consignation et la gestion des événements indésirables, et le recours à l'observation vidéo pour suivre et aider les personnes sous traitement.

Selon le docteur Liga Kuksa, du Centre de lutte contre la tuberculose et les maladies pulmonaires de l'hôpital universitaire de l'est de Riga (Lettonie), l'expérience acquise par les chercheurs a été presque aussi importante que les résultats obtenus. « Les résultats encourageants et l'expérience tirée de cette recherche ont été très rassurants pour les médecins qui soignent la tuberculose multirésistante », explique-t-elle.

« Passer d'un schéma thérapeutique long (qui pouvait durer jusqu'à 3 ans, avec des de longues périodes
d'hospitalisation) aux régimes thérapeutiques courts peut sembler risqué pour un clinicien. C'est compréhensible. Nous sommes formés pour pratiquer une médecine fondée sur des preuves et, grâce à cette recherche, les cliniciens se sentent désormais en confiance lorsqu'ils recourent à ces schémas thérapeutiques plus courts, car nous disposons à la fois des preuves et de l'expérience nécessaires pour voir davantage de personnes guérir de la tuberculose multirésistante. »

Il a été établi que les schémas thérapeutiques les plus récents recommandés par l'OMS contre la tuberculose augmentaient les chances d'un rétablissement complet. Aujourd'hui, il est plus facile pour les patients d'observer leur traitement et de le mener à terme, et les nouveaux régimes thérapeutiques sont plus efficaces. Les séjours à l'hôpital sont aussi courts que possible ou - dans de nombreux cas - ne sont pas nécessaires. Comme on ne procède à aucune injection et qu'il y a beaucoup moins de médicaments à prendre, les patients peuvent être suivis en ambulatoire. Cela signifie qu'ils peuvent rester en famille, dans leur environnement habituel, et éventuellement continuer à travailler.

Qu'est-ce que la recherche opérationnelle ?

La recherche opérationnelle est menée dans le cadre du travail de routine et combine une formation et la collecte de données et d'éléments probants.

Dans le cadre de l'étude de l'OMS, des cliniciens des programmes nationaux de lutte contre la tuberculose ont collaboré avec un groupe de travail de l'OMS composé de spécialistes de la tuberculose multirésistante, jouissant d'une renommée internationale. Les professionnels de santé ont appris à recourir davantage aux modèles de soins ambulatoires, en se servant de la technologie pour encadrer les patients et s'assurer qu'ils prennent leurs médicaments en temps voulu. Ils ont été formés pour poser un diagnostic, consigner et gérer les réactions indésirables, ainsi que pour dépister les effets secondaires tels que les troubles de la vue.

La recherche ouvre de nouveaux horizons

Les chercheurs ont établi un lien entre un bilan thérapeutique moins bon et des risques de maladies non transmissibles telles que le tabagisme, la consommation d'alcool et une mauvaise alimentation. En effectuant un suivi de ces facteurs préexistants dans le cadre de la recherche, les médecins et les infirmiers ont pris conscience des influences qui pourraient limiter la probabilité d'un rétablissement complet.

La corrélation entre le chômage et l'échec du traitement contre la tuberculose a également mis en évidence l'importance de prendre en compte les déterminants sociaux de la santé lorsque l'on planifie l'aide à apporter aux personnes qui suivent un traitement antituberculeux.

Pourquoi la Région européenne de l'OMS avait-elle besoin d'un autre régime thérapeutique ?

Il avait déjà été établi que le schéma thérapeutique standard de 9 mois recommandé par l'OMS en 2020 pour application dans le cadre d'un programme était sûr et efficace. Toutefois, la Région a été - et est toujours - confrontée à une résistance massive à 4 des 7 principaux médicaments utilisés dans ce traitement, qui ne peut donc être administré.

En l'absence d'autres options de traitement plus court, l'OMS/Europe a entamé des recherches opérationnelles pour démontrer l'efficacité et la sécurité de schémas thérapeutiques de 9 mois utilisant des médicaments antituberculeux différents.

Le régime thérapeutique de 6 mois recommandé par l'OMS en 2023 avait remplacé certains des médicaments qui ne convenaient pas pour la Région, mais l'on n'avait pas encore examiné si un nouveau médicament appelé prétomanide était indiqué pour certains groupes de patients ; une solution devait être trouvée pour les femmes enceintes, les mères allaitantes et les enfants de moins de 14 ans. De plus, pour l'heure, les pays de l'Union européenne ont peine à se procurer ce médicament.

Dès lors, les résultats de l'étude de l'OMS ouvrent la possibilité de suivre un régime thérapeutique modifié de 9 mois, qui peut sauver la vie des personnes qui n'ont pas accès au prétomanide ou qui ne peuvent en prendre.
Les traitements de 6 et de 9 mois ont beaucoup de caractéristiques en commun sur le plan de la mise en œuvre, du suivi thérapeutique et de la gestion des événements indésirables, de sorte que l'étude des régimes thérapeutiques de 9 mois a également ouvert la voie à une adoption rapide du schéma thérapeutique de 6 mois là où cela est possible.

Les 13 pays qui ont pris part à la recherche étaient l'Arménie, l'Azerbaïdjan, le Bélarus, la Géorgie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Lettonie, la Lituanie, l'Ouzbékistan, la République de Moldova, le Tadjikistan, le Turkménistan et l'Ukraine.