12/12/2024 | Press release | Distributed by Public on 12/13/2024 04:29
Reporters sans frontières (RSF) répond aux critiques persistantes concernant sa position passée sur Pablo González, un ressortissant hispano-russe qui ne relève plus du mandat de l'organisation. Libéré dans le cadre d'un échange de prisonniers, il a été accusé par un procureur polonais d'espionnage au profit de la Russie. Au cours de l'affaire qui a duré deux ans et demi, RSF a plaidé en faveur de la transparence et de l'équité de la procédure, tout en respectant la prérogative de la justice polonaise de déterminer son innocence ou sa culpabilité.
Le 1er août dernier, il y a plus de quatre mois, un échangede prisonniers a permis de libérer Evan Gershkovichet Alsu Kurmacheva, que RSF avait défendus en tant que journalistes arbitrairement détenus par la Russie. En échange, la Pologne a libéré le ressortissant hispano-russe Pablo González, également connu sous le nom de Pavel Rubtsov. Si RSF considérait auparavant Pablo González comme un journaliste, elle ne l'a jamais considéré comme détenu arbitrairement.
Depuis son arrivée en Russie, Pablo González a agi dans l'intérêt du Kremlin. Il n'a accordé des interviews qu'à des organes de propagande russes, malgré les demandes des médias indépendants. Auprès de la chaîne publique russe Perviy Kanal, il a qualifié les forces russes qui occupent l'Ukraine de "protecteurs" et a raconté comment il s'était entraîné à serrer la main "pour être sûr que [la poignée de main] soit ferme" avant d'accueillir le président russe Vladimir Poutine à l'aéroport. En demeurant, de nouvelles révélations sur ses activités d'espionnage continuent de faire surface. Le 29 novembre, un média russe en exil, The Insider,a identifiéson officier de liaison au sein du service de renseignement militaire russe (GRU), qui l'a également accueilli à l'aéroport de Moscou.
Malgré la position nuancée et justifiée de RSF sur le cas de Pablo González, celle-ci continue à faire l'objet des critiques qui sont aussi reflétées par l'article de The Insider.
"Espion russe, Pablo González est exclu du mandat de RSF depuis l'échange de prisonniers. Il a compromis la profession de journaliste et a abusé des droits des journalistes dans les démocraties. Notre position passée sur cette affaire a toujours été alignée sur les principes de l'état de droit, y compris la présomption d'innocence, les droits des prisonniers et un procès équitable. En même temps, nous faisions confiance au système judiciaire polonais : nous n'avons jamais dit que Pablo González était innocent, et nous n'avons jamais qualifié sa détention de deux ans et demi d'arbitraire.
"En toute conscience du risque que représente le recrutement de professionnels des médias par les services secrets, nous continuerons à être guidés par les standards internationaux en matière de droits de l'homme et à lutter pour les droits des journalistes. Notre démarche reflète à la fois les forces et les faiblesses de la démocratie et celles du combat pour la liberté de la presse. À l'heure de la désinformation, alors que RSF est directement visée par la propagande russe, toute allégation concernant notre soutien présumé à un journaliste - quel qu'en soit l'auteur - devrait être vérifiée auprès de l'organisation.
Aujourd'hui, tout indique que Pablo González - détenu par les autorités polonaises du 28 février 2022 au 1er août 2024 et inculpé d'espionnage par un procureur polonais deux semaines après l'échange de prisonniers - était un espion russe.
Les preuves contre Pablo González
Toutefois, avant de l'inculper, les autorités polonaises ont divulgué peu d'informations du dossier d'enquête en raison des mesures de sécurité de l'État. En particulier, les autorités polonaises ont allégué que Pablo González possédait deux passeports avec deux noms différents. Elles ont refusé de confirmer les informations révélées dans un rapport du média indépendant russe Agentstvo, qui prétendait que Pablo González avait espionné Zhanna Nemtsova, la fille du leader de l'opposition russe Boris Nemtsov assassiné en 2015, et qu'il avait voyagé avec un membre du GRU de Moscou à Saint-Pétersbourg en 2017.
RSF avait cité ces révélations, sans pour autant avoir les moyens de déterminer si Pablo González était coupable ou innocent. Étant donné que, dans une démocratie, seul un tribunal peut rendre un tel verdict, l'organisation a constamment demandé que Pablo González soit jugé dès que possible. En raison des conditions difficiles et de la longue durée de la détention de Pablo González, ce qui n'est pas rare en Pologne, RSF a demandé qu'il soit libéré dans l'attente de son procès ou que son régime carcéral soit amélioré.
RSF a reconnues délais et la confidentialité des procédures du système judiciaire polonais, qui ont fini par retarder l'inculpation de Pablo González, après sa libération. Si la procédure judiciaire avait été plus rapide, M. González aurait été exclu du mandat de RSF beaucoup plus tôt. L'ONG continue de suivre l'affaire, qui concerne toujours une journaliste poursuivie par les autorités polonaises.
Sur le plan international, RSF continuera de faire tout ce qui est en son pouvoir pour libérer les 38 journalistes russes et ukrainiens injustement détenus par les autorités russes, comme en témoigne le dernier appellancé en marge du sommet de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qui s'est tenu à Malte la semaine dernière et qui a accueilli le ministre russe des Affaires étrangères.