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10/31/2024 | News release | Distributed by Public on 10/29/2024 18:16

Côte d'Ivoire : éducation communautaire sur la rage

Le Gbêkê est la troisième région la plus peuplée de Côte d'Ivoire (1). La rage y est endémique chez les chiens. Les communautés ouvrent la voie dans la lutte contre cette maladie mortelle, en collaborant avec les secteurs de la santé humaine et animale pour sensibiliser et informer afin de sauver des vies.

L'Institut national d'hygiène publique, structure chargée de la lutte contre la rage humaine enregistre en moyenne 14 000 morsures de chien et 20 décès dus à la rage par an. Les enfants de moins de 15 ans représentent près de la moitié (47.97%) des décès liés à la rage et les hommes représentent plus de 66 ,22 % des cas de rage humaine signalés (2). Cependant, les données de surveillance de la rage humaine ne sont pas complètes et tous les cas, voire les décès, ne sont pas pris en compte en raison des difficultés liées au diagnostic, à la déclaration des cas et aux comportements de recherche de soins (3).

En 2017, face aux risques que représentent les chiens enragés pour la communauté dans la région de Gbêkê, un Comité local de lutte contre la rage a été créé. Le Comité a été fondé par Arrêté préfectoral (N° 40/P.BKE/SG2 du 20 Nov. 2017) et comprend des représentants des secteurs de la santé animale et humaine, ainsi que des groupes de la société civile, des leaders communautaires, des organisations de médias locales et des organisations non gouvernementales telles que Breakthrough Action. Comme l'indique un spécialiste de la communication, l'engagement communautaire, particulièrement l'implication des leaders communautaires est essentielle dans la sensibilisation sur la rage.

« Nous savons que la sensibilisation et l'éducation à la rage sauvent des vies. Nous devions impliquer toutes les personnes ressources pour mettre au point un programme éducatif qui toucherait tous les coins de notre communauté. En effet, certaines personnes ne suivent que les instructions de leur leader ou guide ».

William Beine, Conseiller technique principal, Breakthrough ACTION

Des campagnes de sensibilisation et d'éducation, élaborées en collaboration avec des enseignants et des éducateurs, ont été organisées dans les écoles, de la maternelle au niveau supérieur. Les enfants, en particulier, peuvent refuser d'informer leur famille s'ils pensent qu'ils risquent d'avoir des ennuis pour avoir joué avec des chiens. Alors que le retard dans la recherche de la vaccination contre la rage coûte la vie. La préventiondes morsures de chiens a été privilégiée à travers la sensibilisation au comportement des chiens et au langage corporel pouvant être un facteur de transformation, en particulier pour les enfants. A travers cette approche participative, le comité de lutte contre la rage veut susciter chez les élèves une prise de conscience vis-à-vis de la rage comme l'indique les propos suivants du premier responsable du comité.

« Nous voulions surtout que les enfants acquièrent le comportement à adopter pour éviter les agressions d'un chien inconnu et comprennent qu'en cas d'exposition à la rage, il est possible de la prévenir en agissant à temps. Nous avons donc enseigné aux enfants, les mesures à adopter vis-à-vis d'un chien afin d'éviter de se faire agresser et l'importance d'un lavage soigneux des plaies et d'une vaccination antirabique post-exposition. Le milieu scolaire est une cible stratégique : d'abord il regorge une population très importante facilement accessible, ensuite, les élèves sensibilisés, vont acquérir de bons réflexes qu'ils vont adopter dans la vie et enfin ils pourraient relayer ces informations dans leur famille respective. Cette prise de conscience et ces connaissances permettront de sauver des vies et d'éviter les retards dans les visites au centre de santé »

Lekouo Traoré, Porte-parole de l'Union des chefs de communautés résidant à Bouaké, président du Comité local de lutte contre la rage de Gbêkê.

le programme a été déjà déployé auprès de plus de 3 200 élèves et 83 enseignants ont reçu une formation en ligne pour diffuser le matériel dans leurs classes. Dans l'esprit de toucher d'autres communautés, le programme ne s'est pas arrêté aux écoles. Le Comité local de lutte contre la rage a étendu la portée du programme à tous les coins de la communauté. Les organisations confessionnelles, les groupes de femmes et les chefs traditionnels collaborent pour partager des informations sur la prévention des morsures et le traitement de la rage.

Bien qu'il reste encore beaucoup à faire pour renforcer les systèmes de santé et recueillir avec plus de précision les données sur le nombre de cas de rage suspectés et confirmés, la sensibilisation et l'éducation de la communauté sont primordiales pour garantir que personne ne perde la vie à cause de cette maladie mortelle. En tout état de cause, la mobilisation communautaire autour de la lutte contre la rage est l'une des étapes clé pour atteindre l'objectif, 0 cas de rage humaine transmise par un chien.

« Nous espérons que les leçons tirées dans la région de Gbêkê inciteront d'autres régions de Côte d'Ivoire à mettre en œuvre des programmes similaires dans leurs communautés. Ensemble, nous pouvons faire en sorte d'atteindre zéro décès dû à la rage d'ici 2030 »

Professeur Isaac Tiembré, Sous-directeur Vaccinologie INHP

Les contributeurs : Coulibaly M'Begnan, Tetchi Mathilde, Djoman-Mangou Christiane, Zogbé Sromon, Coulibaly Adama, Tiembré Issaka

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References

  1. Résultats Globaux du 5ème Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH) 2021 [Overall results of the fifth general population and housing census, 2021]. Abidjan: Côte d'Ivoire Institut national de la statistique (INS); 2022 (https://www.ins.ci/RGPH2021/RGPH2021-RESULTATS%20GLOBAUX_VF.pdf; in French).
  2. Issaka T, Malthide TS, Adama C, Djoman C, Simplice DN, Mireille D, et al. Epidemiological facies of human rabies deaths in Côte d'Ivoire from 2016 to 2022. Open J Epidemiol. 2023;13:373-384 (https://doi.org/10.4236/ojepi.2023.134027).
  3. Zamina BYG, Tiembré I, Attoh-Touré H, N'Guessan KE, Tetchi SM, Benie BVJ. Factors associated with the abandonment of post-exposure prophylaxis at the Abidjan rabies centre, Côte d'Ivoire. Médecine et Santé Tropicales. 2018;28:212-218
    (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29997083/).