11/12/2024 | News release | Archived content
À partir d'aujourd'hui une ordonnance médicale devient nécessaire pour se procurer l'une des spécialités indiquées contre le rhume et contenant de la pseudoéphédrine. Une mesure bienvenue mais insuffisante pour préserver les usagers de ces médicaments plus dangereux qu'utiles dont l'UFC-Que Choisir demande depuis longtemps le retrait.
« Un risque trop important pour les patients. » C'est, en résumé, le motif pour lequel l'Agence du médicament (ANSM) a décidé de réserver à la vente sur prescription les médicaments dits « antirhume » qui étaient jusque-là en vente libre. Depuis des années, les charges s'accumulent contre ces médicaments tels que l'Actifed Rhume, le DoliRhume ou l'Humex Rhume dont Que Choisir déconseille l'usage en raison de la présence de pseudoéphédrine. Cette substance dite « vasoconstrictrice » resserre les vaisseaux sanguins du nez, contrant ainsi, en théorie, la sensation de nez bouché. Mais cette action ne se limite pas à la sphère nasale et la constriction des autres vaisseaux du corps humain peut conduire à des problèmes de santé graves tels que de l'hypertension, des infarctus ou des AVC.
De nouveaux risques neurologiques (syndromes d'encéphalopathie réversible postérieure et syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible) ont également été identifiés récemment. Bien que rares, ces effets indésirables sont réels et surtout disproportionnés par rapport aux bénéfices attendus. En effet, ces médicaments ne soignent pas le rhume ni n'accélèrent sa guérison. Ils soulagent seulement en partie les symptômes, une tâche dont s'acquittent des traitements simples comme le paracétamol pour les éventuels maux de tête et du sérum physiologique à instiller dans le nez pour lutter contre la sensation de congestion. Pour mieux dormir la nuit, surélever le haut du buste et la tête à l'aide de plusieurs oreillers peut aider.
Le Nères, qui représente les laboratoires pharmaceutiques produisant des médicaments vendus sans ordonnance, déplore une décision allant à l'encontre « des besoins en santé publique » en expliquant qu'« en retirant aux pharmaciens la possibilité de conseiller et de délivrer ces traitements pour des pathologies bénignes comme le rhume, cette mesure risque de surcharger inutilement les cabinets médicaux, aggravant ainsi les délais d'accès aux soins pour des patients souffrant de pathologies plus lourdes ». Cette analyse méconnait manifestement le fait que ces médicaments antirhume sont officiellement déconseillés depuis 2023 non seulement par l'Agence du médicament mais aussi par l'Ordre national des pharmaciens et par certains syndicats de pharmaciens d'officine. Les pharmaciens se retrouvaient donc dans une situation contradictoire, incités d'une part à vendre ces produits tout en ayant l'obligation, d'autre part, d'informer les clients de leurs dangers et de leur absence de bénéfice en termes de guérison. Que Choisir avait donc mené une enquête dans 40 pharmacies et constaté que loin de remplir leur tâche d'information, la majorité des pharmaciens vendaient sans précaution particulière ces médicaments antirhume.
Désormais délivrés exclusivement sur ordonnance, ils devraient être nettement moins consommés, un rhume ne nécessitant généralement pas de consultation. D'autant que la balance bénéfice-risque de ces médicaments ne change pas fondamentalement. Elle reste défavorable qu'ils soient prescrits ou non par un médecin. L'Agence française du médicament le rappelle dans sa communication : « Nous maintenons notre recommandation de ne pas utiliser ces médicaments dans le traitement des symptômes du rhume. » Un retrait du marché aurait été une solution plus simple et plus efficace, comme le souhaite l'UFC-Que Choisir. L'agence avait saisi son équivalent européen, l'EMA, en ce sens mais n'avait pas obtenu gain de cause. Ces médicaments trop dangereux pour être consommés passent donc derrière la barrière de l'ordonnance mais restent commercialisés.
Perrine Vennetier