Amnesty International France

08/28/2024 | Press release | Distributed by Public on 08/28/2024 13:04

Le second mandat du président Luis Abinader doit donner la priorité au respect des droits humains et mettre fin aux politiques migratoires racistes

Les mesures permettant la participation de la police nationale, des membres des forces armées et d'autres éléments de la force publique à des opérations migratoires ont entraîné une dispersion des fonctions en matière de migration, ainsi que des procédures arbitraires et opaques. L'absence de formation de ces forces de l'ordre aux droits humains, formation qui est susceptible d'assurer un traitement digne et sans discrimination pour les personnes migrantes, est également préoccupante.

Amnesty International a été informée de faits de corruption, d'extorsion et de possible trafic d'influence de la part des autorités lors d'arrestations, de transferts et de séjours dans les centres de détention, au cours d'opérations migratoires, y compris dans la zone frontalière.

De multiples témoignages indiquent que cette dispersion des fonctions produit une confusion quant aux voies utilisées par les personnes en quête de protection internationale et les personnes migrantes après leur arrestation, encourageant un vaste réseau d'extorsion à l'encontre des personnes migrantes et limitant l'accès à la justice des personnes migrantes haïtiennes qui, parce qu'elles ont peur, ne se rapprochent généralement pas des institutions telles que la police ou le ministère public lorsqu'elles sont victimes d'une infraction pénale. Cela limite notamment les signalements de violences basées sur le genre infligées à des femmes et des filles migrantes haïtiennes. Bien qu'il y ait eu des enquêtes impliquant des agents des services de l'immigration, les autorités n'ont pas mis en place de mesures cohérentes et concrètes pour garantir l'accès à la justice des personnes migrantes victimes de violations des droits humains.

Amnesty International a reçu des informations indiquant que les voies empruntées par les personnes après leur arrestation lors d'opérations migratoires varient en fonction de l'autorité qui les a arrêtées. Généralement, lorsqu'elles sont arrêtées par des agents de la DGM, elles sont embarquées dans des véhicules appelés « camions ». Bien qu'ils aient une capacité de 30 ou 40 personnes, des informations indiquent que les autorités y font monter un nombre supérieur de personnes. Les personnes sont frappées et embarquées de force, et dans de nombreux cas elles ne peuvent pas bouger par manque de place et ont du mal à respirer. On les laisse enfermées dans ces véhicules pendant des heures sous des températures élevées, avant de les transférer dans le centre d'interdiction, sans accès à l'eau, aux services sanitaires ni à la nourriture, ce qui met gravement en danger leur santé.

Amnesty International a eu connaissance desconditions très inquiétantes dans certains centres d'interdiction où les personnes sont emmenées pour « épurer » leur situation migratoire, avant leur expulsion. Les installations ne disposent pas de services et d'espaces adéquats, les locaux sont surpeuplés, on note également un manque d'accès à l'eau et à la nourriture, des restrictions pour communiquer avec les proches et les avocats, et les gens se voient retirer leur téléphone portable. Les autorités responsables ne demandent pas ou n'évaluent pas si ces personnes ont des problèmes de santé nécessitant des soins, et ne leur donnent pas accès à une demande de protection internationale. En outre, l'organisation a reçu des informations de femmes qui ont été victimes de violences sexuelles commises par des agents des autorités dans les centres de détention et lors de leur expulsion, notamment des attouchements, des commentaires au sujet de leur corps et des demandes de faveurs sexuelles en échange de leur libération. Parfois, ces situations vont au-delà de la violation commise par les autorités.

Ces allégations suggèrent que des violations du droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants pourraient être perpétrées dans le cadre d'opérations migratoires.

Amnesty International a appris que des personnes noires, tant dominicaines qu'étrangères, ont été arrêtées arbitrairement sur la base d'un profilage racial et à des fins d'expulsion. Cela met en danger les personnes dominicaines d'origine haïtienne, notamment les bénéficiaires de la loi n° 169-14, qui « établit un régime spécial pour les personnes nées sur le territoire dominicain inscrites irrégulièrement à l'état civil et à la naturalisation ».