10/31/2024 | Press release | Distributed by Public on 10/31/2024 04:11
Stanford Woods Institute for the Environment
Rob Jordan
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Cirad
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Dans les zones rurales d'Afrique, où les moyens de subsistance sont souvent directement liés aux ressources naturelles, la dégradation de l'environnement constitue une menace grave pour les écosystèmes et le bien-être des populations. Une nouvelle étude cosignée par des chercheurs de l'université de Stanford et du Cirad analyse la manière dont diverses communautés africaines ont tenté d'inverser cette tendance et donne des indications précieuses sur ce qui fonctionne. L'étude, publiée le 30 octobre dans Sustainability Science, souligne que les coalitions à long terme entre les communautés locales, les gouvernements et les organisations sont essentielles pour favoriser les transitions durables.
« Chaque endroit est différent et il faut éviter d'adopter une approche unique en matière de politique environnementale, mais nous devons également tirer les leçons des expériences passées pour identifier les conditions qui permettent d'inverser avec succès la dégradation de l'environnement », souligne Eric Lambin, co-auteur de l'étude, professeur à la Stanford Doerr School of Sustainability et chercheur à Stanford Woods Institute for the Environment.
Depuis des décennies, de nombreuses communautés africaines sont confrontées au double défi de lutter contre la dégradation de l'environnement et d'améliorer les moyens de subsistance de la population. Lorsque les terres deviennent moins productives en raison d'une faible fertilisation des sols, de la déforestation ou du changement climatique, la pression sur ces communautés s'intensifie.
Plus récemment, dans de nombreuses régions, de nouveaux efforts ont été déployés pour inverser ces tendances négatives, souvent avec le soutien de gouvernements, d'ONG ou d'organisations internationales. Toutefois, les résultats ont été mitigés, certaines initiatives ayant conduit à des améliorations significatives, tandis que d'autres n'ont pas abouti.
Après avoir examiné 17 cas représentant diverses initiatives visant à inverser la dégradation des ressources naturelles dans 13 pays africains, les chercheurs ont constaté que les interventions réussies partagent généralement quelques caractéristiques essentielles. Tout d'abord, elles impliquent souvent des arrangements solides entre les acteurs, soutenus par des institutions qui fonctionnent bien. Dans des cas comme celui de la région de Shinyanga en Tanzanie, où 90 % de la population a participé aux efforts de reboisement, les résultats ont été impressionnants. La région a vu la restauration de 300 000 à 500 000 hectares de terres boisées, ce qui a contribué à améliorer les moyens de subsistance grâce à la fourniture de ressources telles que le bois de chauffage.
Un autre facteur essentiel est l'alignement des incitations au changement de pratiques sur les objectifs environnementaux. Au Burkina Faso, par exemple, les agriculteurs ont commencé à planter des anacardiers, motivés par la possibilité de vendre leurs produits sur les marchés internationaux. Cette initiative a non seulement créé une nouvelle source de revenus, mais elle a également contribué à lutter contre la désertification en plantant davantage d'arbres. Ces cas soulignent l'importance de veiller à ce que les efforts de restauration de l'environnement répondent également aux besoins économiques et sociaux des communautés.
« Les motivations pour changer les pratiques ou les règles d'usage étaient principalement de nature économique, mais certaines concernaient également la sécurité de l'accès à la terre ou l'amélioration de la fourniture de services écosystémiques à la suite de la restauration des ressources naturelles », précise Camille Jahel, co-autrice et géographe au Cirad.
Outre les coalitions locales, l'étude souligne l'importance du soutien extérieur, en particulier sous la forme de ressources et d'assistance technique. Dans de nombreux cas de réussite, comme au Niger et au Burkina Faso, les ONG et les agences gouvernementales ont fourni les outils, les moyens de diffusion des connaissances et le soutien financier nécessaires au lancement et à la conduite des projets. Ce soutien externe s'est souvent avéré vital dans les premières phases des interventions, réduisant le risque associé à l'adoption de nouvelles pratiques dans un contexte de manque de ressources et de variabilité climatique.
Toutefois, l'étude souligne la nécessité d'un soutien externe adéquat. Dans certains cas, les approches descendantes qui n'ont pas pleinement impliqué les communautés locales ont conduit à un succès limité, voire à un échec. Par exemple en Zambie, une intervention visant à restaurer la faune sauvage a finalement échoué en partie parce que les nouvelles structures de gouvernance imposées par des acteurs extérieurs n'ont pas été acceptées par la communauté locale. Cela souligne la nécessité pour les agences extérieures de travailler en étroite collaboration avec les parties prenantes locales et de respecter les systèmes sociaux et de gouvernance existants.
Les auteurs de l'étude soulignent la nécessité de maintenir la dynamique à long terme. Certaines des interventions qu'ils ont étudiées ont montré des résultats positifs au départ, qui ont ensuite faibli lorsque le financement externe s'est tari. Les chercheurs soulignent l'importance d'intégrer la résilience à long terme dans ces projets, en veillant à ce que les communautés locales puissent continuer à gérer et à maintenir les changements de pratiques et d'organisation sans soutien extérieur permanent. En Namibie, par exemple, certaines des organisations communautaires de gestion de la faune et de la flore, connues sous le nom de « conservancies », génèrent désormais suffisamment de bénéfices pour maintenir leur activité dans le temps.
En tirant des leçons générales des expériences passées en Afrique, cette étude peut aider à contribuer à améliorer la conception, la gestion et le suivi des projets visant à inverser la dégradation des ressources et à adopter des pratiques durables d'utilisation des terres.
« Il est possible d'inverser la tendance en matière de dégradation de l'environnement », conclut Eric Lambin. « La clé réside dans la création d'interventions à long terme qui sont menées localement et qui intègrent les préoccupations liées à la pauvreté, soutenues par des structures de gouvernance solides et basées sur des coalitions d'acteurs ».
Ces travaux de recherche ont été financés par le Centre d'études interdisciplinaires Stanford-France-Stanford en collaboration avec le Stanford Woods Institute for the Environment.
Jahel, C., Lambin, E.F. Reversing degradation of social-ecological systems: explaining the outcomes of interventions in Africa. Sustain Sci (2024). https://doi.org/10.1007/s11625-024-01568-5