ARCEP - Authority for regulation of the electronic communications and postal sectors of the French Republic

11/05/2024 | Press release | Distributed by Public on 11/05/2024 07:14

'Aujourd’hui, le numérique, si indispensable à notre économie, si essentiel à notre quotidien, semble insoutenable.'

Chère Véronique Torner, cher Gilles Mézari,

Je tiens en premier lieu à remercier Planet Tech Care et Numeum pour l'organisation, une nouvelle fois, de cet événement important.

Pourquoi est-ce important, finalement ? Ça l'est au moins à deux titres :

D'abord, pour valoriser les pratiques, les expériences, les innovateurs qui mettent le numérique au cœur des solutions pour l'environnement, et pour répondre au plus grand défi auquel nous sommes collectivement confrontés : le réchauffement climatique. Je vois qu'il y a ici des entreprises qui, avec des solutions largement basées sur le numérique, aident à l'optimisation de la gestion de l'eau, à l'aménagement urbain ou à la durabilité de l'agriculture. Je suis convaincue qu'il est absolument essentiel de maximiser et de visibiliser ce type de solutions et d'initiatives.

Je suis également convaincue du fait que cela ne suffira pas. Et c'est mon deuxième point. Pourquoi en suis-je convaincue ? Et bien parce qu'à l'Arcep, depuis 2020, nous collectons, analysons et publions des données pour caractériser l'impact environnemental du numérique. Ces travaux sont complétés par des études menées notamment avec l'ADEME. J'ai eu l'occasion de présenter nos constats l'an passé, devant vous. Je ne vous ferai pas l'offense de rappeler tous les chiffres que j'ai alors donnés. J'en présenterai néanmoins deux :

  • Si rien n'est fait, l'empreinte carbone du numérique en France pourrait tripler entre 2020 et 2050 ;
  • 10 % de la consommation électrique française est déjà liée aux services numériques.

Les chiffres que nos organismes publient depuis 2020 sont sans appels : désormais bien documentés, les impacts environnementaux du numérique se révèlent de plus en plus importants. Pire encore : la forte croissance de ces impacts n'est pas compatible avec les engagements pris par la France et l'Union européenne à travers l'Accord de Paris. Aujourd'hui, le numérique, si indispensable à notre économie, si essentiel à notre quotidien, semble insoutenable.

Que faut-il en conclure ? Qu'après le temps de la prise de conscience vient le temps de l'action collective : de nombreuses initiatives, de nombreuses associations de nombreuses entreprises, aident leurs clients à réduire les impacts de leurs infrastructures IT. De plus en plus d'entreprises facilitent le reconditionnement, la réparation de matériel. D'autres proposent des téléphones très facilement réparables pour en accroitre la durée de vie. Certaines sont dans cette salle et se reconnaitront. Ce sont des pistes prometteuses, tant tous ces éléments sont interdépendants. J'aimerais évoquer une autre piste avec vous, aujourd'hui, puisqu'elle permet d'agir sur l'ensemble des composants et équipements de la chaîne de valeur du numérique : l'écoconception des services.

Ça n'est pas à vous que je vais l'apprendre : cela consiste d'abord à ce que les développeurs et éditeurs rendent leurs services plus efficaces, pour qu'ils consomment moins de ressources de l'équipement de l'utilisateur, des centres de données, ou de bande passante du réseau, pour un niveau de service équivalent. Mais il est également temps de remettre en cause certaines fonctionnalités introduites dans les services numériques comme l'autoplay ou le défilement infini. Ces fonctionnalités, conçues pour que nous passions toujours plus de temps en ligne, ne sont-elles pas superflues ? Ne faut-il pas aussi promouvoir l'idée d'une certaine « sobriété » en matière de numérique ?

C'est dans ce contexte que nous avons produit, avec l'Arcom, en lien avec l'ADEME et en concertation avec un grand nombre de parties prenantes, le Référentiel général de l'écoconception des services numériques. Certains d'entre vous nous ont d'ailleurs fait des retours que nous avons intégrés avant sa publication. Face aux grandes plateformes numériques, principaux fournisseurs des services numériques que nous utilisons, nous sommes convaincus que le bon niveau d'action est l'Europe et souhaitons inscrire notre démarche à cet échelon, dans la lignée des chantiers lancés par la précédente mandature dans notre secteur. Nous ne pourrons pas le faire seuls. Nous comptons sur l'ensemble de l'écosystème pour non seulement faire vivre le principe de l'écoconception, mais aussi pour le mettre en œuvre progressivement dans chaque service, et pour inciter ses fournisseurs, ses clients, ses partenaires à faire de même. Voilà ce qui permettra la propagation de l'écoconception, et son passage progressif à l'échelle européenne. Bien évidemment il ne s'agit pas de pénaliser les entreprises françaises ; c'est même le contraire : c'est d'abord une opportunité d'avoir un avantage compétitif par la performance énergétique des services, pour elles et leurs clients B2B [au moment où s'ouvre la concertation sur la Stratégie nationale bas carbone et sur la programmation pluriannuelle de l'énergie]. Il s'agit aussi de leur permettre d'avoir cette longueur d'avance et qu'elles tracent un chemin que de nombreuses entreprises européennes suivront dans les années à venir.

C'est en cela qu'un tel forum est essentiel : c'est le vecteur d'idées importantes pour le secteur numérique ; ce lieu, c'est aussi un laboratoire des idées et des pratiques qui permettront le numérique de demain. Vous y contribuez toutes et tous et vous savez que, si l'on souhaite que le numérique bénéficie au plus grand nombre demain, il se doit de progresser. C'est une immense tâche, et ces deux jours contribueront tout naturellement à poser quelques jalons importants.

Je vous souhaite à toutes et tous un excellent GreenTech Forum.