Université de Montpellier

12/02/2024 | News release | Distributed by Public on 12/02/2024 09:35

Terratis, la start-up qui voulait tuer le tigre dans l’œuf

Terratis, la start-up qui voulait tuer le tigre dans l'œuf

[Article] - Publié le 2 décembre 2024 dans Pôle Universitaire d'Innovation (PUI)

Créée en 2024 et accompagnée par l'incubateur académique Initium, Terratis se lance dans la production massive de moustiques stérilisés. Courant 2026, la start-up construira un bio-usine pilote, et déploiera sa technologie dans deux collectivités et un camping. A terme, elle se dotera d'un site industriel plus important encore pour pouvoir accroître ses capacités de production d'ici 2028.

Qui a connu l'enfer des nuées de moustiques tigres envie forcément ces pionniers… En 2025, les habitants de deux collectivités et d'un camping bénéficieront de la technologie de la société Terratis pour venir à bout de l'Aedes albopictus. Son mode opératoire : lâcher des armées de mâles stérilisés pour créer des générations d'œufs tout aussi infertiles. Un épilogue prometteur pour cette jeune start-up, après plusieurs années de maturation dans les arcanes du pôle universitaire d'innovation (PUI) de l'UM.

Une baisse de 60% du taux de natalité

A l'origine de Terratis, il y a une thèse menée de 2009 à 2012 pour le compte de l'IRD sur l'île de la Réunion. Celle de Clelia Oliva, qui a appliqué la technique de l'insecte stérile (TIS) au moustique tigre pour la toute première fois. "Ma thèse a consisté à mettre au point une partie de ce processus : maîtriser la reproduction d'un insecte, en produire des millions par semaine, les stériliser via les rayons X, et les relâcher", détaille la fondatrice de la start-up. En 2021, l'IRD s'attelle à fournir la preuve de concept sur une vingtaine d'hectares, et les résultats s'avèrent très encourageants, les taux de natalité de l'Aedes albopictus diminuant de près de 60% en quelques semaines dans le quartier-test. De son côté, Clelia Oliva décide donc de "sortir du labo et de faire du concret". "Je savais que c'était un bel outil et qu'il fonctionnait très bien. Il fallait passer à une autre échelle. Au départ, je pensais me lancer via une entreprise déjà existante, mais j'ai finalement lancé le projet moi-même".

Rapidement, à l'aide de l'incubateur académique Initium, elle lance les prémices du projet. "Quand je leur en ai parlé, ils m'ont soufflé dans les voiles. Ils m'ont ouvert la voie, et ils m'ont dit qu'ils avaient tous les outils pour m'aider", se souvient Clelia Oliva. Dans la foulée, elle participe au programme Jump'in création du BIC (l'incubateur Business & innovation centre) de la métropole de Montpellier et s'initie à tous les volets de la création d'entreprise, de la comptabilité à la gestion des ressources humaines. "Quand on vient de la recherche, il faut former son cerveau à une autre façon de penser", explique-t-elle. Une première étape qui lui permet d'être pré-incubée au BIC, et de décrocher la subvention Start'Oc Projet, un financement de 10 000 euros délivré à l'époque par la région Occitanie.

Une subvention de BPI France déterminante

En 2023, encore en ante-création, le projet bénéficie aussi d'une subvention BFT lab de 120 000 euros, peu avant une deuxième enveloppe de 90 000 euros dédiée aux start-ups Deeptech, toutes deux délivrées par BPI France. En 2024, l'IRD lui octroie un transfert de savoir-faire via la Satt AxLr (société d'accélération du transfert de technologies), acteur majeur du PUI de l'Université de Montpellier. Pour la phase d'amorçage, la Satt lui donne accès à un programme de maturation de près de 830 000 euros. "Cet investissement nous a permis d'embaucher trois personnes et d'acheter tout l'équipement. C'est un programme qui dure 15 mois et qui va contribuer à notre lancement l'année prochaine", ajoute Clelia.

Tout au long de son parcours, pour les volets techniques, étude de marché et communication, la subvention BFT lab reçue via la Satt AxLR s'est avérée être un soutien de poids. "Cette somme m'a permis de travailler avec mon futur associé Dorian Barrère, qui est d'abord intervenu en tant que consultant sur les aspects "communication" et "accès au client" grâce à ce financement. Et puis il s'est pris au jeu", confie encore Clelia Oliva, qui lançait officiellement Terratis dès le mois d'avril 2024.

3000 insectes par hectare et par semaine

Labellisée MedVallée, Terratis est en train d'investir des locaux de près de 200m2 dans la zone d'activité Parc 2000. "Cette usine pilote va nous permettre de développer l'automatisation de l'élevage, avec une capacité de production de 1 à 1,5 millions de moustiques par semaine, et de démarrer nos ventes". A court terme, Terratis devrait démarrer son déploiement commercial avec une capacité de couverture de 300 hectares, répartis dans un premier temps sur deux quartiers issus de deux collectivités territoriales différentes et un camping. Elle pourrait également irriguer des aéroports, zones sensibles si des virus du genre Zika ou chikungunya venaient à se répandre via les moustiques tigres femelles…

"Au total, dès 2025, nous allons pouvoir relâcher environ 3000 insectes par hectare et par semaine d'avril à novembre", anticipe la présidente de Terratis. Mais dès 2026, elle passera à l'étape industrielle avec un projet de bio-usine plus important encore. "A partir de 2028, nous envisageons de produire jusqu'à 100 millions de mâles par semaine. Cela nous permettra de protéger près de 40 000 hectares de territoire… La force de ce moustique, c'est qu'il a une forte capacité de reproduction. La femelle peut pondre des centaines d'œufs, mais elle ne se reproduit qu'une fois. Nous, nous voulons appuyer sur cette faiblesse".

Dans un avenir proche, Terratis pourrait aussi appliquer cette technique à destination des ravageurs agricoles, type mouche méditerranéenne des fruits, carpocapse de la pomme et drosophila suzukii. Le but : offrir une alternative aux pesticides et aux produits chimiques.

Mots clés : Environnement, Incubateur, Initium, Innovation, PUI, Recherche, Start-up